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Notre histoire
L’objection de conscience au Canada
Au Canada, le droit à l’objection de conscience est reconnu depuis plus de 200 ans. Il fut instauré pour favoriser l’immigration. En 1793, les Mennonites, les Quakers et les Frères en Christ sont exemptés de l’obligation de servir dans la milice. De 1873 à 1899, cette exemption est étendue aux Doukhobors et aux Huttérites.
Pendant la Première Guerre mondiale, les membres de ces « églises historiquement pacifistes » sont exemptés du service militaire, alors que d’autres objecteurs de conscience n’en bénéficient pas. Certains doivent accomplir leur service militaire en tant que non-combattants. Les personnes qui refusent sont emprisonnées. Les objecteurs de conscience s’opposent également à l’achat d’obligations de guerre. Finalement, des obligations spéciales sont émises pour financer uniquement les opérations de secours.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, le statut d’objecteur de conscience est initialement réservé aux groupes religieux. En 1942, toute objection de conscience, religieuse ou laïque, est admise. Le service alternatif sous contrôle civil est mis en place. Une fois encore, des obligations spéciales sont émises pour l’aide aux civils uniquement. À la fin de la guerre, on compte plus de 10 000 objecteurs de conscience.
Au Canada, depuis la fin de la guerre de Corée, il n’y a plus de conscription militaire. Aujourd’hui, la guerre et le militarisme dépendent de la conscription des impôts plutôt que des personnes.
Depuis 1978, Conscience Canada et son précurseur, le Comité du fonds en fiducie pour la paix, travaillent à l’obtention du droit des objecteurs de conscience à consacrer leurs impôts uniquement à des programmes pacifiques. Au fil des ans, des député.e.s1 des principaux partis politiques du Canada appuient cette démarche2.
En 1982, la Constitution canadienne consacre la liberté de conscience fondée sur la morale laïque et la religion. Conscience Canada est constitué en 1983 en tant qu’organisation laïque. Conscience Canada dépose une plainte pouvant faire jurisprudence contre l’obligation de payer des impôts à des fins militaires3.
En 1983, la première motion émanant d’un député4 réclamant un Fonds national d’impôts pour la paix est déposée à la Chambre des communes. De 1984 à 2013, douze autres motions et projets de loi suivent5.
Pendant plus de 40 ans, Conscience Canada maintient un Fonds fiduciaire des impôts pour la paix. Les objecteurs de conscience à l’impôt militaire peuvent y déposer la fraction militaire de leurs impôts. Leur argent est conservé en fiducie jusqu’à ce que le gouvernement mette en place un dispositif officiel permettant aux objecteurs de conscience de rediriger la fraction militaire de leurs impôts vers des programmes non violents. En 2022, Conscience Canada décide de clôturer ce Fonds6.
Pourtant, la nécessité de cesser de financer la guerre persiste. Il est amplement démontré que le militarisme et la guerre menacent le bien-être des êtres humains et du vivant dans son ensemble. Nous savons également que la guerre et le militarisme finissent par saper la sécurité, la justice et la démocratie. Investir dans des moyens de protéger ce que nous aimons en utilisant le pouvoir de la non-violence est la meilleure forme de « défense », non seulement pour des raisons éthiques, mais aussi sur le plan de l’efficacité.
Nous devons continuer à œuvrer pour le respect de notre droit à la liberté de conscience. Nous savons qu’un autre mode de vie plus sain sur terre est possible, et nous nous réjouissons à l’idée que toutes et tous participent à la mise en place de ce mode de vie.
- Parlementaires ayant appuyé Conscience Canada et l’objection de conscience à l’imposition militaire : les sénateurs Eugene Forsey et Nancy Ruth, les député.e.s Althouse, Atamanenko, Funk, Jewett, Knowles, Manly, Ogle, Robinson et Siksay. Par ailleurs, d’autres personnes, qui n’adhèrent pas forcément à l’objection de conscience à l’égard de l’impôt militaire, ont collaboré d’une façon ou d’une autre avec Conscience Canada, notamment Jean Augustine, Borys Wrzesnewskyj, Andrew Telegdi et Elizabeth May.
- En 1981, une lettre écrite par l’expert constitutionnel, le sénateur Eugene Forsey, et par six député.e.s est largement publiée. On y déclare notamment ceci : « En période de conscription militaire, l’exemption du service militaire peut être revendiquée pour des raisons de conscience, et le service alternatif peut être approuvé. Il conviendrait également de pouvoir revendiquer l’exonération du financement des préparatifs de guerre et de proposer une solution de rechange ».
- L’affaire est rejetée au motif qu’en vertu de la loi relative à l’impôt sur le revenu, il n’y aurait pas de lien entre un contribuable et l’utilisation de ses impôts. En 1990, la Cour suprême refuse d’entendre l’appel. L’ancien juge Thomas Berger, avocat de la partie qui refuse de contribuer à la guerre par ses impôts, estime que la loi sur l’impôt sur le revenu est contraire à la constitution et, à ce jour, cette question n’a jamais été examinée par un tribunal.
- Motion soumise par Jim Manly le 23 mars 1983
- Le projet de loi le plus récent est le C-363 (2013) : « Loi concernant l’objection de conscience à l’utilisation de l’impôt à des fins militaires » soumis par Alex Atamenenko, député.
- Ce Fonds n’est plus utile pour bon nombre d’objecteurs de conscience. Certains ont trouvé une façon de réduire leur revenu imposable au point que le gouvernement est incapable d’utiliser leurs impôts à des fins militaires. En outre, pour de nombreux Canadien.ne.s (environ 85 %), les impôts sont déduits de leur salaire à la source, de sorte qu’ils n’ont rien à verser à la fin de l’année et ne sont donc pas en mesure de réaffecter les impôts au Fonds fiduciaire prévu à cette fin.
Lectures complémentaires (en anglais seulement) :
Conscientious objection to military taxation. Wikipedia
For Conscience Sake. Edith Adamson and Jane McEwan. Third Edition, 1991
Freedom of Conscience. Centre for Constitutional Studies. 2019
Mennonite Archives of Ontario est le dépositaire officiel des archives de Conscience Canada
One Man’s Justice: A Life in the Law. Thomas Berger. 2002. Douglas & Mcintyre
Peace Tax Fund: A war of conscience. Susan Berlin. 1984
The First Freedom: Freedom of Conscience and Religion in Canada. Gisela Ruebsaat. Third Edition, 1991
Alternative Service raconte l’histoire des objecteurs de conscience canadiens, en s’appuyant principalement sur des documents conservés au Mennonite Heritage Centre, Winnipeg
En tant qu’objecteurs de conscience, nous ne nous contentons pas d’éviter le service militaire puisque nous savons qu’une partie de nos impôts servira à payer pour la guerre et pour d’autres formes de violence. Nous savons que, par l’intermédiaire de nos impôts, nos gouvernements font de nous des complices de la guerre, peu importe nos croyances et nos valeurs.
Nous désirons nous assurer que tous les fonds que nous verserons au gouvernement serviront à des fins pacifiques. Nous nous désignons donc comme des objecteurs de conscience opposés aux impôts militaires.
Conscience Canada travaille depuis 1978 à :
- promouvoir un changement législatif qui reconnaîtrait à tous les Canadiens le droit de ne pas payer l’impôt militaire, en vertu du droit à la liberté de conscience garanti dans la Charte des droits et libertés;
- maintenir un Fonds en fiducie pour la paix dans lequel les objecteurs de conscience peuvent verser la portion de leurs impôts destinée à des fins militaires;
- sensibiliser davantage les Canadiens au lien qui existe entre les impôts et la guerre, et promouvoir l’objection de conscience à l’encontre du militarisme et de la guerre, et à
- soutenir la prévention et la résolution de conflit par des mesures pacifiques et innovatrices.